Depuis plusieurs années, la loi funéraire fait l’objet de profondes réformes initiées par le législateur afin de la simplifier et d’intégrer les évolutions récentes du secteur (augmentation du nombre de crémations, taux d’occupation des cimetières élevés). Nous devons être particulièrement vigilants dans la conduite des opérations funéraires ; en effet, le risque de litige est particulièrement élevé dans ce domaine.
L’article L. 2223-1 du Code général des pouvoirs locaux stipule que :
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« Chaque commune ou chaque établissement public de coopération intercommunale compétente en matière de cimetières possède au moins un cimetière comprenant des terres consacrées à l’inhumation des morts et, dans les communes de 2 000 habitants, au moins un site cinéraire destiné à recevoir les cendres des personnes décédées dont le corps a donné lieu à la crémation. »
Chaque commune est donc tenue d’avoir un cimetière. Toutefois, rien n’empêche, par exemple, que ce cimetière est situé sur le territoire d’une autre municipalité ou que sa gestion est déléguée à une EPCI (article L. 5215-20 du même code).
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A. La police administrative du cimetière
Dans cette gestion du cimetière, le maire par ses pouvoirs de police administrative générale et spéciale (voir notre article sur le contentieux administratif à ce sujet) assure un rôle essentiel.
Ainsi, il est chargé de « maintenir l’ordre et la décence dans les cimetières » (article L. 2213-9 du Code général des pouvoirs locaux), mais également :
- permis de transport pour personnes décédées (art. L. 2213-9 et R.2213-21),
- autorisations de stockage temporaire (art. (N° 2213-29)
- sépultures (art. L. 2213-9 et R. 2213-31),
- exhumations (art. L. 2213-9 et R. 2213-40),
- la surveillance des lieux de sépulture (Art L. 2213-10),
- la détermination des vacances pour les opérations de surveillance (art. L. 2213-15),
- crémation (art. R. 2213-34, R. 2213-37, R. 2213-39)
Chacun de ces actes peut faire l’objet d’une requête en annulation devant le tribunal administratif (voir notre page sur les recours pour excès de pouvoir) ou d’une action devant le juge judiciaire.
Que dois-je faire en cas de conflit entre les proches du défunt ?
Il n’est pas de la responsabilité du maire de la municipalité de jouer un rôle de médiateur au sein des familles et il semble souhaitable, lorsqu’un tel conflit survient, de reporter la décision jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé ou à défaut a saisi le juge.
Quel est le rôle de l’avocat funéraire à ce stade ?
L’avocat funéraire vous assistera dans la rédaction des différents décrets de police que le maire est susceptible d’adopter ou lors de la rédaction des règlements de cimetière. Il vous assistera également dans les litiges initiés par une famille ou une entreprise devant toutes les juridictions, qu’elles soient administratives, civiles ou pénales.
B. Inhumation/exhumation
1. Enterrement
En vertu de l’article L. 2223-3 du Code général des pouvoirs locaux, une inhumation dans le cimetière communal est due :
- aux personnes décédées sur son territoire, quel que soit leur domicile ;
- aux personnes domiciliées sur son territoire, même si elles étaient décédées dans une autre municipalité ;
- aux personnes qui ne sont pas domiciliées dans la commune, mais qui ont droit à un enterrement familial dans cette commune ;
- aux Français établis hors de France qui n’ont pas de sépulture familiale dans la commune et qui sont inscrits sur la liste électorale de la commune.
Dans une telle situation, le maire ne peut pas refuser l’inhumation dans le cimetière communal.
2. Exhumation/récupération administrative
L’article L. 2223-4 du Code général des pouvoirs locaux prévoit que : « Un ordre du maire attribue à perpétuité, dans le cimetière, un ossuaire construit où les restes exhumés sont immédiatement ré-enterrés. Le maire peut font également exhumer les restes incinérés en l’absence d’opposition connue, attestée ou présumée du défunt. Les restes de personnes qui avaient exprimé leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l’ossuaire. »
En vertu de cet article et des dispositions générales qui le précèdent, il est de la responsabilité du maire, dans l’exercice de ses pouvoirs de police (L.2213-8 et L 2213-9 du même Code), d’effectuer la crémation des restes trouvés dans les concessions prises en charge pour diverses raisons (concession en état d’abandon, récupération des terres communes, fin de concession…).
Cette crémation des restes exhumés, également appelée exhumation administrative, est régie par diverses dispositions réglementaires, qui précisent qu’un délai de cinq ans doit nécessairement s’écouler entre l’inhumation et l’exhumation administrative : « L’ouverture des fosses pour les nouvelles inhumations n’a lieu que cinq ans sur cinq ans » (article R. 2223-5 du même code)
L’article R. 2223-6 du même Code précise que : « Les cendres des restes exhumés doivent être déposées dans un columbarium, dans l’ossuaire ou dispersées dans le lieu spécialement prévu à cet effet prévu à l’article R. 2223-9. »
Aucune autre disposition ne précise les modalités pratiques de ces exhumations administratives.
3. Concessions
L’article 2223-13 du Code général des pouvoirs locaux dispose que : « Lorsque l’étendue des cimetières le permet, des terres peuvent être accordées aux personnes qui souhaitent y fonder leur sépulture et celle de leurs enfants ou successeurs. — Des espaces peuvent également être accordés pour le dépôt ou l’enterrement des urnes dans le cimetière. — Les terrains nécessaires pour les séparations et les passages établis autour du cimetière. Les concessions foncières mentionnées ci-dessus sont fournies par la municipalité »
a. La Durée des concessions
Une municipalité n’a pas le droit d’accorder une concession dans son cimetière, même si c’est la coutume. De même, les communes ne sont pas tenues de fixer toutes les périodes prévues à l’article L. 2223-14 du Code général des pouvoirs locaux :
- concessions temporaires d’une durée maximale de 15 ans ;
- concessions sur trente ans ;
- concessions sur 50 ans ;
- concessions perpétuelles.
L’octroi d’une concession est subordonné au paiement d’un capital déterminé par le conseil municipal (article L. 2223-15, paragraphe 1, et R. 2223-11 du Code général des pouvoirs locaux, CE 26 oct. 1994, demande n° 133244).
Le renouvellement d’une concession est possible moyennant le versement d’un nouveau capital correspondant à la durée accordée (qui peut être plus longue que la durée initiale).
Seul le manque d’espace ou une raison d’intérêt général peut être opposé à une demande d’octroi de concession (CE 25 nov. 1921, Dames Niveleau, Lebon 274, CE 27 avril 1923, Trottereau-Berthelot, Lebon 366).
Attention
Concessions non perpétuelles expirées et non renouvelées dans le délai de deux ans accompli après l’expiration initialement prévue peut être repris par la municipalité après avoir constaté l’état d’abandon (articles L. 2223-15, paragraphes 3 et 4, L. 2223-17, L. 2223-18 et R. 2223-12s du Code général des pouvoirs locaux).
Quel est le rôle de l’avocat funéraire à ce stade ?
L’avocat funéraire vous assistera dans le cadre d’un litige lié à une prise en charge administrative d’une concession funéraire.
b. Droits du concessionnaire
Le maire de la commune est habilité à imposer le respect de certaines règles concernant la construction de caves et de sépultures, ainsi avec l’article L. 2223-12-1 du Code général des pouvoirs locaux, il a le pouvoir de fixer les dimensions maximales des monuments érigés sur les concessions.
Une fois les constructions réalisées sur la concession, elles deviennent la propriété à part entière des concessionnaires (Cass. Civ. 3e, 17 décembre 2003, no 02-17.388).
Les inscriptions figurant sur les monuments funéraires doivent être soumises au maire de la commune (article R. 2223-8 du Code général des pouvoirs locaux).
Ainsi, l’inscription « Familles ! Je te déteste ! malgré l’opposition des proches du défunt (CAA Nancy, 28 octobre 2014, réq. n°14NC00686)
4. Carrés confessionels
Le principe de neutralité résultant de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des églises et de l’État qui impose aux cimetières et s’oppose à l’obligation de fournir une partie d’un cimetière étant faite à chaque office.
Cependant, il faut tenir compte de la liberté des funérailles accessible à tous et qui est garantie par l’article 3 de la loi du 15 novembre 1887 : « Tout adulte ou mineur émancipé, en état d’épreuve, peut réglementer les conditions de ses funérailles, notamment en ce qui concerne leur caractère religieux et le mode de son enterrement. »
Ces dispositions doit être complétée par les sanctions pénales prévues en cas de violation, volontaires à la volonté du défunt.
L’article 333-21-1 du Code pénal dispose que : « Quiconque donne à des funérailles un caractère contraire à la volonté du défunt ou à une décision judiciaire, testament ou décision dont il a connaissance est passible d’une peine de six mois d’emprisonnement et d’une amende de 7 500 euros ».
Si aucune obligation de créer une place confessionnelle n’est imposée à une commune, c’est à elle, en revanche, de ne pas porter atteinte à la volonté du défunt lors de prises de contrôle administratives en ne respectant pas le culte qu’il aurait pu adopter.
Le maire peut déterminer l’emplacement attribué à chaque tombe (CE, 21 janvier 1925, Vales) et ainsi recueillir les sépultures de personnes de même confession, sous réserve des principes de neutralité des parties publiques du cimetière et de liberté de choix de l’inhumation familiale soient respectés.
Une circulaire de 2008 précise les modalités de mise en œuvre de cette place confessionnelle :
- « La décision d’aménager des espaces ou des places confessionnels dans le cimetière communal ou d’accepter l’inhumation d’un défunt qui ne réside pas dans la commune appartient au maire et à lui seul ; c’est un de ses propres pouvoirs et il n’est pas à vous de vous substituer à lui en prenant cette décision qui, bien que cela puisse paraître souhaitable, n’est toutefois pas seulement facultatif. Le maire a toute latitude pour apprécier l’opportunité de créer ou non un espace confessionnel.
- Le maire doit s’assurer que les parties publiques du cimetière ne comportent aucun signe distinctif de nature confessionnelle. L’espace confessionnel ne doit pas être isolé des autres parties du cimetière par une séparation matérielle de quelque nature que ce soit, conformément à la loi du 14 novembre 1881.
- Toute personne ayant droit à une sépulture dans le cimetière de la commune, au sens de l’article L. 2223-3 du CGCT, doit pouvoir y être enterré quelle que soit sa religion et sans contrainte. Dans la mesure où il existe un espace confessionnel, c’est à la famille ou, à défaut, à un proche de faire la demande expresse pour l’inhumation du défunt dans cet espace, le maire n’ayant pas à décider, de sa propre initiative, du lieu d’inhumation selon les prétendus aveux du défunt ni à vérifier la qualité confessionnelle du défunt ayant une autorité religieuse ou toute autre personne susceptible de fournir des informations sur l’appartenance religieuse du défunt. Il sera limité à l’enregistrement du vœu du défunt ou de la demande de la famille ou de la personne autorisée à payer les funérailles.
- La famille du défunt décide librement de l’emplacement d’une éventuelle stèle sur l’inhumation ou l’apparence extérieure de celle-ci, en individualisant l’enterrement par l’installation de plaques funéraires, de signes religieux ou d’emblèmes, à la seule condition que le parti pris ne soit pas offensant pour les autres familles ayant une tombe dans le cimetière et susceptible de troubler l’ordre public.
- Il peut donc arriver qu’une personne qui ne partage pas les aveux d’un défunt précédent ait explicitement souhaité être enterrée aux côtés d’un proche, ou que sa famille ait considéré qu’il était conforme au souhait du défunt de l’enterrer dans un espace confessionnel à proximité d’un parent ou d’un parent ou dans un chambre forte familiale insérée dans un espace confessionnel. Il peut être indiqué au maire que, pour respecter les souhaits du défunt ou des familles, il serait souhaitable d’accéder à la demande d’inhumation dans l’espace confessionnel tout en évitant de déformer cet espace. Il convient toutefois de souligner qu’un aménagement raisonnable en la matière suppose de ne pas apposer sur la tombe du défunt un signe ou un emblème religieux qui déformerait l’espace et pourrait offenser certaines familles. L’article R2223-8 du CGCT prévoit qu’aucune inscription ne peut être apposée sur des pierres tumulaires ou monuments funéraires sans avoir été soumise au préalable à l’approbation du maire. Ce dernier peut, en effet, s’opposer à l’inscription funéraire proposée, sur la base de ses pouvoirs policiers visant à assurer l’ordre public et la décence dans le cimetière.
- Toutes les règles et réglementations relatives à l’hygiène et à la salubrité, en particulier celles relatives à la conservation des corps et à leur mise dans la bière, doivent être strictement respectées ; l’enterrement directement dans le sol et sans cercueil ne peut être accepté (article R. 2213-15 du CGCT).
- Lorsqu’une municipalité reprend, dans les conditions fixées par le Code général des pouvoirs locaux, le lieu d’une sépulture sur un terrain commun ou celui d’une concession privée, les restes des corps exhumés doivent être déposés dans l’ossuaire communal. Les communes disposant d’un espace confessionnel dans leur cimetière devraient être invitées à créer, dans la mesure du possible, un ossuaire réservé aux restes du défunt de la même confession. »